lundi 30 mars 2009

DOWN UNDER - NOUVELLE ZELANDE - L’ÎLE SUD



Le Nord du Sud : Queen Charlotte Sound et Abel Tasman National Park

Aux dires des locaux, la traversée du détroit de Cook peut être redoutable. Le Cook Straight est un goulet naturel pour les vents dominants de Nord-Ouest, les quarantièmes rugissants. Mais pour nous, exceptionnellement, le rugissement s'était transformé en un gentil miaulement.
Le ferry embouque le Tory Channel puis le Queen Charlotte Sound au fond duquel se niche Picton. Ce petit bourg est beaucoup plus important qu'il n'y paraît au premier regard. C'est le terminus de la SH1, route principale de l'île sud, le bout de la ligne ferroviaire en provenance de Christchurch, le point de départ des canots et vedettes-taxis qui déservent les lodges et maisons privées - quelquefois de luxe - isolées et disséminées le long du Sound. Mais surtout c'est le port des ferry assurant la liaison entre les deux îles.

Torry channel



Au B&B "The Gabbles", une maison en bois colorée des années 1930, accueil chaleureux des propriétaires,un couple amateur de nature et de navigation récemment installé à Picton après de nombreuses années passées au Kenya.
Quant au restaurateur qui nous accueille ce soir là pour déguster une délicieuse loche, il vient de Berne et l'accent d'outre Sarine passe bien dans ce coin reculé.
Explorer le Queen Charlotte Sound c'est découvrir un autre de monde, tout de criques et de baies abritées qu'illuminent des bleus et des verts irréels que l'on découvre d'un catamaran à moteur, l'Endeavour Express, qui nous emmène vers l'embouchure du Sound.
Nous débarquons dans Ship Cove, où Cook carénait et réparait ses bateaux, une crique émeraude, ourlée de sable blanc que domine une végétation dense et tropicale.
Pas de route mais un sentier qui longe le Sound sur toute sa longueur: le Queen Charlotte Track, très prisé des Neo-Z. Au programme un trek de 4 heures pour rejoindre notre lodge à Punga Cove dans une zone à faible dénivelé (on n'est jamais trop prudent). Paysages merveilleux, à l’ombre de fougères géantes.

Le long du Queen Charlotte track



Un compagnon de treck: un tui, merle siffleur, adepte du bel canto, et qui n'en finit pas de discuter avec Gérard

Plus bas se succèdent les criques turquoises. Fourbus, nous arrivons à Punga Cove, lieu de repos pour les marcheurs, pour découvrir notre joli bungalow noyé dans la végétation, dominant le Sound. Barbecue au bord de l’eau et repos. Une symphonie orchestrée par des insectes cachés dans les frondes de fougères nous berce et nous endort.

Punga cove: notre bungalow noyé dans la verdure

1er février: ça y est c’est le mois d’Août !
L’Endeavour Express surnommé par les autochtones « Whenever express » nous reprend pour nous ramener à Picton après bien quelques haltes pour desservir les maisons isolées du Sound. Nous prenons possession de notre nouvelle voiture, soeur jumelle de la précédente, et admirons encore une fois depuis les hauteurs, le Queen Charlotte Sound qui découvre des vues magnifiques de mer et de montagnes couvertes de conifères.
Arrêt à Hammerloc, "capitale mondiale de la moule verte", pour déguster les délicieux mollusques grillés à la mode… »provençale ».
Après une traversée rapide de Nelson l’itinéraire nous conduit en direction de Abel Tasman National Park au bout du monde pour dénicher la lodge « La Resurgence ». Une lodge solitaire cachée dans les eucalyptus et protégée par des plans successifs d’écrans verts. Bruissement de feuilles d’eucalyptus mêlé au chant des grillons, loin de tout, on s’immerge dans la nature.
Cook, Cook et re-Cook. Sacré grand homme omni présent. Il ne faut tout de même pas oublier que 130 ans avant lui, Abel Tasman, un sacré marin hollandais, le devançait sur ces côtes que son cartographe nomma Niuew Zeeland en souvenir de la mère patrie. Et la mer de Tasmanie, ce n'est quand même pas pour rien! Tasman était à la recherche d'un continent énorme, la "Terra Australis Incognita" qui pourrait faire contre-poids à toutes ces terres de l'hémisphère nord: le tout restant en équilibre, il fallait bien quelque chose d'équivalent dans l'hemisphère sud. La connaissance scientifique n'est juste qu'au moment où on l'énonce...
Et si ce parc national se nomme Abel Tasman c'est aussi bien mérité.
Un petit catamaran à moteur, son jeune skipper et 8 retraités en goguette. Le ciel est gris, le vent souffle à 15-20 nœuds.
La côte défile. Le vert du bush domine, parfois interrompu par une plage d'un jaune-orange étrange. Des phoques, des manchots bleus ; visite et galipettes de Georges le dauphin qui fait son numéro pour épater les kayakistes ; des fous de bassan qui planent et plongent sur leur proie comme des Stukas, disparaissent sous les eaux et remontent poisson au bec.

Fou de bassan

Les plages de sable orangé sont vierges de toute présence humaine. Nos traces de pas qui troublent cet équilibre fragile sont presqu'un sacrilège sur cette planète à l’aube des temps. Pour les huitriers au bec rouge cet univers sublime n'est que normalité.

Seuls au monde

L'aube de toutes choses

Un joli coup de hache

Le skipper plus "down to earth" bien que très attentif à la nature environnante annonce la nécessité de faire un plein d’eau. Mais où donc peut-on trouver de l'eau dans ce parc loin de toute construction, de tout habitat ? Au fond d’une petite baie flotte, amarré à une bouée, un tuyau d’où sort en continu une source pure descendant de la montagne. Le tuyau est saisi avec une gaffe, connecté et 15 minutes plus tard le plein d'une eau quasi minérale est terminé. Quand on vous dit que les neo-Z vivent en symbiose avec la nature…

La côte ouest


Bye-bye la « Résurgence », son silence nocturne, sa quiétude diurne bercée par le bruissement des feuilles d'eucalyptus et le frottement métallique des élytres des grillons. En route pour la côte ouest de l’île du sud.
En 1929 un tremblement de terre de magnitude 7.6 sur l’échelle de Richter se déchainait dans la région et aujourd’hui les cicatrices en sont encore bien visibles.
Une grosse pierre tombée d’un camion a la malencontreuse idée de se glisser sous une des roues de notre voiture : pneu explosé et roue déformée. La roue est changée. Un routard s’arrête enlève la pierre de la route et vient nous aider ; version Neo-z de "les routiers sont sympas" .
Les paysages s’enchaînent d’une variété incroyable. En 100 km nous traversons successivement la Hollande, la Bretagne, le Wyoming, l’Ardèche avant de retrouver les tropiques et ses cocotiers et ses palmiers choux au bord d’une mer de Tasmanie qui mugit en s’engouffrant dans des grottes et des infractuosités taillées dans des falaises millefeuilles, accumulations de strates pendant des éons : les Pancakes de Punakaiki.



Les pancakes de Punakaiki



Le pneu éclaté et surtout la roue déformée méritent réparation. La halte technique sera Greymouth, gros bourg où l’agence Toyota peut commander une nouvelle jante à Auckland ! 500 km + ferry et le lendemain matin la jante est là. 15 minutes pour placer un nouveau pneu et nous voilà à nouveau en route. Tout ça avec le sourire et sans énervement : vraiment cool ces Neo-Z. En attendant, la pluie s’est mise de la partie et délave une mer gris argenté. Des dauphins Hector font mollement les "cent pas" devant l’embouchure du fleuve. Quelques chalutiers bien rouillés s’alignent sur les pontons manifestement trop fatigués pour repartir en mer. Les montagnes environnantes regorgent de jade, jadéite et autre néphrite. La pierre attire le chaland qui flâne dans la ville endormie : musée du jade, expositions, bijouteries. Catherine repartira avec un bracelet vert … jade.

Il y a pourtant du poisson frais dans les restaurants...

Pour parfaire notre connaissance en bijouterie allons visiter une ancienne mine d’or qui a cessé ses activités en 1910. Santytown est une parfaite reconstitution d’une petite ville de la fin du 19ème siècle avec sa gare et son train à vapeur fabriqué à Glasgow, en parfait état de fonctionnement. Un orpailleur nous apprend le maniement de la batte et 15 minutes plus tard le début de notre fortune brillait au fond d’un petit flacon. Tout calcul fait, il est plus rentable d’être manœuvre sur un chantier. Pas étonnant que la ruée vers l’or se soit calmée.

Shantytown: ruée vers l'or...

Les glaciers Franz Josef et Fox, un petit peu comme nos glaciers des Alpes mais en plus propres, plus blancs et forêts de palmiers-choux à leur pied en prime.
Le choc de la journée restera la traversée d’une forêt primaire, dense, touffue, torturée, extraordinaire enchevêtrement de gigantesques araucarias et de quelques 160 espèces de fougères.


Glacier Franz-Josef

Glacier Fox

Un petit crochet par Okarito que nous avons renommé Ilona-City. Selon Ilona la plage regorge de pépites d’or mais, peu doués sans doute, nous sommes revenus avec un petit caillou de jade.
Encore une journée de contrastes : les glaciers et les forêts primaires sont remplacés par les prairies des pre-Alpes avant atteindre la mer turquoise. Tant de pays traversés en si peu de temps dans une solitude absolue. Pas d’habitations, aucun être humain, aucun troupeau : le monde à ses débuts.

Forêt primaire



Le long de la SH6



Nous arrivons fourbus à Wanaka après avoir cumulé 2 étapes en une journée, réparation de la roue oblige.



Queenstown et autour

De Wanaka à Queenstown en s’arrêtant à Arrowstown et au pont du saut à l’élastique, le bungy invention Neo-Z bien entendu. Car quand il s’agit d’un sport de l’extrême, un Neo-Z n’est jamais bien loin.

Bungy!

Bungy en couple!

La route tournique au milieu de spectaculaires collines d’herbes rases alternant toutes les nuances de jaune et d’ocre pour finalement virer à toute une gamme de vert en descendant vers Queenstown.

De Wanaka à Queenstown: la Comté, le "Hobbit land"



Un télécabine nous amène au Bob's Peak dominant la ville de Queenstown et le lac Wakatipu.

Queenstown

Petites échoppes et bistrots branchés bordent les rues piétonnes. Un vieux vapeur appareille pour un petit tour de lac. Des artistes parcourent les quais sur leurs vélos de cirques, d’autres attendent patiemment un modèle à croquer au fusain.
Nous avons cessé de comptabiliser les possums écrasés sur les routes. Et qu’est-ce qu’un possum allez vous demander ? Et bien c’est un petit marsupial, grand comme un lapin et importé d’Australie il y a une cinquantaine d’années pour la qualité de sa fourrure. L’ennui c’est que ces charmantes petites bêtes ont, comme nous d’ailleurs, adoré la Nouvelle-Zélande et se sont multipliés de manière exponentielle : les 50 couples de départ ont aujourd’hui 50 millions de descendants qui dévorent toutes les nuits environ 2000 tonnes de feuilles des forêts mettant en danger la sylviculture locale. Pièges, poisons, toute une batterie de moyens sont mis en œuvre pour se débarrasser de ce fléau. Voilà pourquoi quand un Neo-Z voit un possum sur la route il accélère pour être sûr de ne pas le rater. Et, comme disait notre guide de la « 90 Milles Beach » : « il y a 3 variétés de possum mais celle que je préfère c’est la variété plate, celle que l’on trouve sur les routes ! ».

Dans l'hémisphère nord, Sissi aurait été à bord

La route longe le lac découvrant de spectaculaires points de vue. Nous sommes très matinaux car nous avons rendez-vous avec le grand-frisson : la remontée de la Dart River en jet boat autre invention de ces diables de Neo-Z. En résumé : 80 km/h sur une rivière qui par endroits n’a pas plus de 10 cm d’eau, passage à quelques centimètres de rochers, tête à queue, dérapages contrôlés alors que défile l’eau opaline et des paysages superbes et sauvages sur fond de montagnes dentelées et de glaciers pour finir dans une large vallée ocre qui vient mourir, et nous aussi, dans un lac bleu foncé.



Après ça nous allons faire quelques sauts à l'élastique!



Il y a bien des années, une forteresse, Isengard, fut construite au bord de cette prairie par les Dunedain de Gondor qui l'abandonèrent pendant le troisième âge. Saruman le blanc l'occupa par la suite jusqu'à sa destruction par les Ents pendant la guerre de l'Anneau.

En cet endroit, les Ents sortirent de leur forêt pour détruire la forteresse de Saliman

Après le premier passage de l'Ombre, les Ents s'étaient retranchés dans la forêt de Fangorn. Ils ne voyaient pas d'un bon œil les ravages de Saruman le Blanc qui avait privé leur race des arbres entourant l'Isengard, les déracinant d'un lieu où ils vivaient en paix depuis des siècles.
Finalement, les Ents prirent d'assaut la forteresse de Saruman et l'en chassèrent avec l'aide de Gandalf Le Blanc.
Sur la route du retour une immersion dans le calme absolu, loin des vrombissements des 500 chevaux, est la bienvenue sous la forme d'une marche en forêt de 2 heures, Catherine, Gérard et sa canne à 10 $ !
Départ de Queenstown pour Kingston, pas de jaloux !
En réalité : une ville pour la reine et un village pour le roi. Mais dans ce village une gare avec un train charbonneux, sa locomotive enrobée de vapeurs et ses wagons boisés. Une petite famille indienne s’apprête à partir en « voyage ». Nostalgie du Commonwealth !

Fjordland

Au bout de la route aujourd’hui c’est Te Anau et son B&B « Shakespeare House ». Nous héritons de la chambre « Henry V » avec un portrait du dramaturge à la place du crucifix…
La salle de cinéma locale projette le même film en continu depuis 10 ans : un superbe documentaire sur la région, le « Fjordland ».
En catamaran nous voila partis sur le lac Te Anau, direction les vers luisants. Débarquée sur un ponton ruisselant de pluie la petite troupe, après un briefing de sécurité, s’engouffre sur les talons d’une guide dans un labyrinthe de grottes où circule un torrent fracassant. Au bout du labyrinthe, un petit lac. Embarquement dans une plate d’aluminium manœuvrée par notre amazone dans le silence et l’obscurité la plus totale. Soudain la voute est étoilée. Une nuée de points lumineux bleutés tapissent la grotte : des vers luisants par milliers.
Ce soir-là les nématodes ne nous couperont pas l’appétit : le gigot à la menthe fut délicieux.
Aujourd’hui, l’aventure s’appelle « Millford Sound » le must du must en Nouvelle-Zélande et il pleut, il pleut, il pleut. Mais c’est normal, c’est pratiquement le point de la planète où il pleut le plus : 8 à 12 m par an! Et il y en a qui se plaignent du climat genevois.
Quelques photographes très patients ont rapporté des photos par grand ciel bleu et c’est vraiment superbe : des montagnes coniques couvertes d’une végétation dense, des falaises rocheuses et sévères plongent à pic dans la mer de part et d’autre du sound véritable autoroute bleue. Aujourd’hui un jour où Noé s’active à terminer son arche avant qu’il ne soit trop tard, les falaises ruissellent à l’infini de milliers de cascades. La montagne pleure une véritable fin du monde aquatique. Du bateau, entre les rideaux de pluie, surgissent des fous de bassan et des phoques, bien indifférents aux problèmes météorologiques.



Six heures après la fin de la pluie, les cascades tariront. Le seul problème c'est que six heures sans pluie c'est rare, très rare!







Nous l'avons vu comme ci-dessus; d'autres l'ont vu comme ci-dessous...



« Do you care for a nice cup of tea? » “Lovely” répondit le portrait de William.
Doubtfull Sound: le second must NZ. Et, aujourd’hui, miracolo, le soleil brille!
L’accès au Fjord Doubtfull se mérite. Tout d’abord une traversée du lac glaciaire Manapouri en catamaran, puis 15 km en bus par l’ancienne route du chantier de la centrale hydro-électrique du même nom qui utilise la différence de niveau entre le lac et la mer. Un site pratiquement inaccessible pour un gigantesque chantier qui dura 20 ans. Aujourd’hui les touristes profitent d’une route « scenic » au milieu de forêts primaires avec des points de vues exceptionnels sur le fjord. Après un col c’est une plongée de 500 m vers la mer où nous attend un grand catamaran flambant neuf.

Le Doubtfull sound vu du col Wilmot

Une autre forêt primaire





Autour du fjord principal de nombreux bras innervent un paysage de début de planète jusqu’à son embouchure sur la mer de Tasmanie. Cook ne dépassa pas cette entrée car il craignait d’être piégé au fond du fjord par les incessants vents d’ouest. Il nomma donc ce mouillage « Douteux », « Doubtfull ».
Afin de sentir au plus profond de soi la nature originelle, le capitaine mit le bateau en panne au milieu d’un bras particulièrement impressionnant. Moteurs et générateurs coupés, les passagers, recueillis écoutaient le silence absolu du lieu.
Même la centrale, se cache silencieuse, enfouie à 300 mètres sous terre, respectant la nature primitive.



Les Catlins

A l’horizon, le sud de l’île du sud. Après, plus rien à part le petit caillou de l’île Stewart, plus rien jusqu’en Antarctique. Un univers désolé, sauvage et battu par le vent : « Les Catlins ».
Des moutons, des moutons, des moutons, des collines vertes, une côte souvent déchiquetée, parsemée de rochers, repos de phoques à fourrure et de lions de mer, des forêts, des pins échevelés, courbés par le vent du large.

Stigmates des quarantièmes rugisssants



La route est longue et sinueuse. Au gite de « Catlin’s Farm » nous accueillent Jude et Murray, un gîte au milieu des collines alternant forêts et pâturages. Chambre au milieu de bosquets de fleurs. Dahlias roses, rouges et oranges. Les premiers voisins sont à 3 km : le petit hameau de Niagara Falls : trois maisons. La chute a 50 cm de dénivelé et 4 m de large, un petit clin d’œil aux cousins canadiens. L’église fut transformée en école, aujourd’hui transformée en restaurant, ah vraiment, quelle bonne idée !
Le voisin de Murray, un autre éleveur gère tout seul du haut de ses 70 ans ses 5000 moutons et ses 1500 cerfs et biches, avec une seule jambe et un seul chien ! Les habitants des Dunedins sont vraiment des coriaces.



Murray nous fait les honneurs de son domaine de 500 hectares et de ses milliers de moutons et vaches. Il nous apprend à reconnaître les différents prés clos: ceux à herbe dure et plus haute pour les bovins et ceux aussi vert qu’un green de golf pour les agneaux tout juste sevrés. Il explique le stockage des balles de foin pour l’hiver, la tonte annuelle, le ramassage de la laine… Murray vit sa ferme, raconte son histoire : le défrichage des terres à l’age de 25 ans avec Jude, les débuts dans une baraque où le plancher risquait de céder à tout moment et au toit approximativement étanche, la construction de leur nouvelle maison toute pimpante, le démarrage de l’activité B&B de Jude et maintenant, les deux fils, complètement opérationnels sur leurs propres exploitations, prets à prendre la relève, la retraite dans l’autre maison de Wakahana se profile à l’horizon sereinement.
La traversée des Catlins se poursuit. Une marche au travers d’une forêt primaire à l’abri de podocarpes géants et de fougères orange nous conduit sur une plage-lagune désertique immense. Le sol sableux est encore humide et dur de la dernière marée. Au sol, des trésors de coquillages, de bois flottés, d’os d’oiseaux. Au loin la mer lèche la plage en se rapprochant. La marée monte.

Promenade avant la dernière période glaciaire

L'aube de la création



Bois pétrifié

Un phare blanc sur un éperon écarquille les yeux pour apercevoir l’Antarctique et répète inlassablement « à gauche le Pacifique, à droite la mer de Tasmanie » sous les regards somnolents de phoques à fourrure et de lions de mer.




Dunedin et la péninsule Otago


Hypnotisés par cette nature vierge, sans s’en apercevoir nous retournons à la civilisation : c’est Dunedin l’Edimbourg de l’hémisphère sud. Attachez vos ceintures, ici plus qu’ailleurs c’est l’écossais guttural qui prévaut.
La péninsule Otago : encore une journée nature placée sous le signe de la faune.
L’albatros royal, le plus grand des oiseaux, extraordinaire planeur, glisse sans effort, utilisant vent et thermiques le long de la falaise Taiaroa décrivant inlassablement des grands cercles majestueux au dessus de notre petite embarcation. A terre des cormorans à col blanc alignent leurs nids.

Mais que fait Troll en Nouvelle-Zélande?

Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.
....



Les Cormorans à plastron blanc nidifient...


...pendant que les focs à fourure se bronzent



De l’autre côté du cap une route serpente au milieu de pâturages moutonneux, monte et descend, remonte et redescend. Une barrière cadenassée barre le chemin ; détail, notre guide a la clé ! Le petit van arrête sa course au bord de la falaise. Le reste se fera à pied par un sentier plongeant vers la mer. Il est 17.00 et c’est très important car en fin de journée s’opère le grand chassé-croisé animalier : les manchots à œil jaune sortent de l’eau après une longue journée de pêche, tandis que les phoques à fourrure ainsi que les lions de mer finissent leur sieste sur la plage avant de repartir en mer pour leur chasse nocturne.





Vous ne voyez pas que je fais la sieste!

Elle est fraîche mais ça valait le coup: une super bonne pêche!

Peu à peu les manchots sortent d’une vague se secouent et commencent leur marche ondulante pour retrouver leur nid sur les hauteurs qui dominent la baie. Mais que cette marche est pénible et lente… On se traine, on souffle, on repart… pfff que c’est pénible la terre ferme.
C’est la Saint Valentin et les Dunediniens se pressent à un gigantesque marché bobo ou énorme « garage sale » qui occupe tout le centre de la ville : des meubles, de la vaisselle, des fringues tout faits ou à faire, des bateleurs, des jongleurs, des orchestres d’étudiants, des écossais en kilt avec cornemuse sous le bras.
Mais encore une fois la route est longue jusqu’au Mount Cook. Pas beaucoup de temps pour fouiner.

Sur la plage de Moeraki, les boules de pétanque mesurent un mètre de diamètre


Le Mont Cook


Le Mont Cook se découvre à l’horizon à l’arrière plan du lac Pukaki peint en bleu à la bombe fluo. Le lac fait bientôt place à une vallée glacière large et plate jaunie par les tussocks desséchés. Très loin une grande construction isolée, face au point culminant de NZ : l’hôtel Hermitage. Toute l’équipe de tournage du Seigneur des Anneaux y a séjourné un bon moment. Le site est impressionnant et de nombreuses scènes, en particulier la bataille de Pelennor y furent tournées.



Le mont Cook est au bout de la route

Tout simplement les Alpes du sud

Des glaciers dégringolent des montagnes et viennent mourir dans des lacs en se disloquant en petits icebergs et autres grollers.
Des paysages de steppes assez arides nous escortent presque de manière ininterrompue jusqu’à Christchurch la capitale de l’île du sud.

Christchurch & suburbs

Ce soir notre halte sera victorienne, au Orari B&B, superbe demeure fin du 19ème siècle.
Découverte du centre de la ville : chemin bucolique le long de la rivière Avon, petits ponts, vieux tramway, étudiants en costume avec blaser rayés noir et blanc, cathédrale anglicane « gérée » par des paroissiens bien décidés à convertir tout ce qui bouge dans un rayon de 100m « Non Madame, mon cas est désespéré ».

En flannant dans Christchurch





La route appelée « triangle du Pacifique » est paraît-il superbe mais il pleut des cordes. On programme un arrêt à Hanmerfalls, station thermale aux eaux chaudes sulfureuses et nous voilà passant sous la pluie de piscine en piscine variant la température de 38 oC à 42 oC et la teneur en souffre. Nous trempons à 42oC et notre voisine de piscine, une jeune Neuchateloise de la Brévine, nous apprend que ses parents lui ont annoncé le matin même une température de -31oC dans sa vallée du Jura… On savoure le bain chaud !
A peine séchés, toujours sous la pluie, direction Kaikoura au bord du Pacifique, lieu de prédilection des baleines à bosse et des cachalots. La visibilité plus que limitée ne pousse pas à l’exploration maritime et à la recherche des cétacés mais plutôt à rallier au plus vite notre superbe lodge fruit de l’imagination du propriétaire architecte : une série de cases-arbres sur pilotis ou trépieds. Bois, acier et verre. Au niveau de la canopée on découvre d’un coté la mer, de l’autre la montagne.

Dans la canopée

Et le dîner est en phase avec l’architecture.
Dernier jour. On descend de notre perchoir et prenons la direction de Christchurch sous un beau ciel plombé, le long d’une mer indigo et de collines ondulantes et jaunes. Comme d’habitude, des cyclistes en vadrouille équipés de grosses sacoches et parfois de remorques, surgissent souvent au plus mauvais moment dans un virage où il faut déboiter pour les doubler en souhaitant qu’une autre voiture ne surgisse pas en sens inverse sur cette route étroite. « Share the road » dit le panneau. A 2 ça va, à 3 c’est juste ! Etre cycliste sur les routes de Nouvelle-Zélande c’est vraiment vivre dangereusement.
A Christchurch il y a un passage obligé : écouter le Wizard, le sorcier. Cet ancien professeur d’université à la retraite tient tous les jours de 13.00 à 14.00 sur la place de la cathédrale un discours sur la politique, notre société, la folie des hommes etc tout y passe devant un public très attentif. Car si le raisonnement parait loufoque, en réalité ce n’est qu’une apparence et de la spirale du verbe sort toujours une chute logique. « Ce sont les femmes qui détruisent la planète, par le SHOPPING ! » Suit évidemment une démonstration hilarante de 15 minutes. Pas une hésitation : le discours est fluide, le personnage charismatique.

Le Wizard prodigue sa vision du monde. Une belle conclusion pour un voyage la tête en bas

Il proclame également que la traditionnelle vision « borealo-centric » est incorrecte et propose « un monde à l’envers » où l’antarctique et le sud sont en haut de la carte (une demi-heure de démonstration et on est parfaitement convaincu). Sa vision de l’univers inversé mettant à la poubelle les théories actuelles de la physique vaut largement le quart d’heure d‘écoute.
En octobre 1990, il fut nommé « Sorcier de Nouvelle-Zélande » par le Premier Ministre Mike Moore.
Un conseil, consultez son site : http://wizard.gen.nz/

Tout a une fin

Pendant 5 semaines Catherine et Gérard ont marché sur la tête en allant de ravissement en émerveillement.
La nouvelle Zélande reste dans nos souvenirs comme le plus extraordinaire pays que nous ayons jusqu’ici visité : une nature préservée, respectée et ceci d’autant plus facilement que la densité de population est extrêmement faible, 4 millions d’habitants sur la surface de la Grande-Bretagne. D’accord il y a 50 millions de moutons et 40 millions de possums mais eux au moins ne bétonnent pas ! Et les Neo-Z à force de vivre proche de cette nature sont d’abord agréables, courtois, respectueux de l’autre et surtout simples. L’arrogance « brit » est restée à l’entrée du Channel.
On se rappellera les forêts primaires, les Sounds vertigineux, les landes et les toundras sans fins, les changements de végétation et de relief faisant passer de Norvège aux Antilles en quelques heures, les albatros qui planent et replanent, les manchots à l’œil jaune, les lions de mer qui somnolent sur le sable fin, les arbres torturés par les quarantièmes rugissants, les plages infinies des temps anciens, les forces magmatiques contenues qui fument, gargouillent et colorent, la mer qui frappe et taillade la roche basaltique, les glaciers qui viennent mourir dans la forêt tropicale et tellement d’autres merveilles.
La Nouvelle Zélande est une des dernières terres émergées formée, vomie des fonds marins après la dislocation du Gondwana.
La Nouvelle Zélande est la dernière terre à avoir été habitée par l’homme. C’était au 13 ème siècle, hier matin.
La Nouvelle-Zélande sera la dernière terre à être habitée lorsque l’homme aura terminé sa destruction du reste de la planète.

Epilogue

Que reste-t-il au programme? Des broutilles sans intérêt, 23 heures d’avion et 33 heures de voyage, une douche au VIP lounge de l’aéroport de Singapour, un café au terminal de Zurich.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Chers Catherine et Gérard,
Que de beaux voyages ! J'admire la végétation luxuriante et immense, et les paysages "géologiques" avec de vraiment magnifiques couleurs !
Vous me faites rêver !
Nous sommes actuellement plus modestes,et partons demain pour un tour à vélo itinérant de Milan à Vérone ! Nous nous réjouissons !
PS. Je suis grand-mère d'une petite Thémis de 8 mois, ..mais qui vit en Auvergne !
Bisous et bonne suite ! Margareth