mardi 31 mars 2009

DOWN UNDER - Janvier & Février 2009

Depuis bien des années les désirs de découverte de la Nouvelle Zélande somnolaient dans les couches périphériques du subconscient, placés là avec une quantité d’autres lieux, petits cailloux planétaires, sur une route circum-navigatrice rêvée. La réalité modifia le rêve et le geo-cercle se transforma en cercle atlantique, un tour de la voie lactée, le circuit du laitier.
De la couche périphérique au conscient la distance est faible et la Nouvelle Zélande refit surface au milieu des frimas genevois, attirante et chaude, juste à 12000 km entre nos pieds.
Les idées toutes faites sur le pays s’enchevêtrent pêle-mêle : les moutons, les « All Blacks », la coupe America et Peter Blacke, l’Everest et Edmund Hilary, James Cook et des images plus récentes issues du « Seigneur des Anneaux », le Commonwealth etc. Vraiment une connaissance un peu limitée pour se lancer dans un tel périple.
Un petit peu de lecture s’imposa : des guides touristiques et quelques surfs endiablés sur le WEB. La société Frogs of New Zeeland fut chargée de la partie « intendance ». Marie nous concocta un joli circuit émaillé de Bed and Breakfast, motels et autres lodges de qualité qui se perfectionna au fil des itérations. Quelques mois plus tard, tassés au fond de nos sièges d’un Airbus A320 la relativité de toutes choses tomba « Bienvenue à bord, notre vol à destination de Zurich durera 20 minutes… ». Somme toute il ne reste plus que 23.30 heures de vol pour atteindre les antipodes…
En réalité le voyage ne fut pas direct car un « petit » crochet par la Nouvelle Calédonie s’imposait où Patrick et Myriam les amis de Filao nous attendaient de pied ferme pour nous faire visiter leur « caillou ».
Le récit de ces aventures australes comporte donc trois chapitres :

- La nouvelle Calédonie
- L’île du nord de la Nouvelle Zélande
- L’île du sud de la Nouvelle Zélande

lundi 30 mars 2009

DOWN UNDER - NOUVELLE CALEDONIE



Quelle idée d'avoir des amis qui habitent "down under" à 23 heures d'avion ou 33 heures de voyage de chez soi.
Les 33 heures furent digérées et oubliées, la Nouvelle Calédonie avalée à un rythme d'enfer guidés par Patrick et Myriam, infatigables qui présentaient "le caillou", LEUR île.
Après une première immersion dans Noumea c'est un tour de la Grande Terre à un rythme bien soutenu : deux fois la Corse en trois jours... suivi de "la Nouvelle Calédonie vue de la mer", une balade dans le lagon calédonien à bord de Filao II.
Voilà pour le programme. Alors, en route!
La Grande Terre, 400 km de longueur sur 50 km de largeur moyenne, c'est à peu près les cantons de Genève, de Vaud et du Valais perdus au milieu de l'océan Pacifique. La comparaison s'arrête là. La végétation tropicale, le lagon et le climat n'ont rien d'helvétique!
Ce qui n'apparait pas sur la carte c'est le gros cordon ombilical qui relie l'île à la France. Le goutte à goutte transfuse une quantité incroyable de denrées métropolitaines car comment se passer de notre bon beurre de Normandie...
Ceci participe aussi à lutter contre un certain sentiment d'isolement, le spleen de tout îlien.
Dès notre arrivée nous posons nos sacs dans notre nouvel "appart" de Nouméa gentiment prêté par Monique et Robert Leborgne. Arbres inconnus, chants d'oiseaux, au loin l'océan Pacifique. Avec 10 heures de décalage horaire, nous rêvons un peu...
Première immersion dans l'ambiance coloniale de Noumea, savant mélange de Cannes et de Cayenne, une succession de baies et de presqu'îles que le novice confond et mélange.

Noumea

Un petit air de Cayenne

La place des palmistes est vraiment ressemblante

Une visite à l'excellent musée de Nouvelle Calédonie permet de se faire une bonne idée de la culture mélanésienne. Une jeune femme d'une quarantaine d'années, nostalgique de son enfance dans sa tribu, alors guidée et éduquée par ses grand-parents "qui savaient tout sur la nature", nous envoute de récits et de souvenirs. Vie actuelle dans les tribus, apport de la culture européenne, l'impact de la télé... tout y passe. Et comme elle dit, elle qui est moitié-moitié: "Nous, les Européens, sauveront la culture mélanésienne car les jeunes Canaques s'en foutent: ils préfèrent les discos et les belles voitures!".

Le Musée de la ville

Le centre culturel Tjibaou

10 grandes cases de bois et de verre alignées le long d'une allée bordée de pins colonnaires, c'est la vision de Renzo Piano du village mélanésien traditionnel. Site exceptionnel entre lagon et lagune. Collections de sculptures et peintures. Prise de conscience des racines culturelles.
Synthèse architecturale superbe des techniques de constructions modernes et de tradition mélanésienne.

Ce Piano est vraiment un génie









Le tour de la Grande Terre

Difficile de séjourner en Nouvelle Calédonie sans croiser régulièrement la mémoire du bagne. De 1864 à 1897 22'000 condamnés furent envoyés en NC. Ils façonnèrent l'île pendant leur incarcération et aussi après leur libération. Leurs nombreux descendants (une bonne moitié de la population caldoche actuelle) continuèrent la mise en valeur. Les ancêtres suaient à la réalisation du réseau routier. Chaque caldoche a ainsi un ancêtre ingénieur des travaux publics... Mais, j'oubliais, l'ensemble de la population affirme descendre des gardiens du pénitencier.

Bagne du fort Teremba



Une traversée de l'île vers la côte ouest à la végétation luxuriante: araucarias, kaoris, fougères arborescentes, bananiers, flamboyants, eucalyptus et d'impressionants bambous géants.















Plus loin des niaoulis (sorte d'eucalyptus) ou des gaiacs (sorte d'acacias). Ici tout est spécial, isolement îlien oblige. Aussi parle-t-on de faux-accacias, de faux-gommier, faux-poivrier. Tout est faux-quelque-chose.

Nous avons fait la coutume et le "ptit geste": la voie est libre vers la case du chef

Un rocher qui s'amuse: c'est la poule de Hienghène, le bourg dont Tjibaou était originaire








Phase navigation

Cabotage dans le lagon calédonien à bord de Filao II
Peu de vent pour cette première étape en direction de la baie de Prony. Bleu rouge et vert. Le vert pour la garigue, le rouge du sol qui cache son nickel, le bleu de l'eau coralienne.

Cabotage dans le lagon calédonien à bord de Filao II



Coiffé de colonaires



L'ancre plonge dans l'anse de la tortue à l'entrée de la baie de Prony près de l'îlot Casy afin de raccourcir la route du lendemain vers l'île des Pins .
L'heure est sportive: Kayak et marche accompagnée de chiens galeux un tantinet collants.
Un cordon ombilical de grosse capacité ça se finance: ici, la manne céleste se nomme nickel. Mais, comme on n'a rien sans rien, le paysage subit les outrages de la technologie ce qui ne plait pas toujours aux écologistes locaux.
Le soleil se lève sur la baie Prony. Il est 6.00 et l'équipage est pret à mettre le cap sur l'île des Pins la prometteuse. Un vent bruineux sort d'un ciel plombé couvrant une côte plus écossaise que calédonienne. A trois noeuds le Yanmar hoquète contre le vent et les vagues: la navigation de plaisance dans tous ses états.
Demi-tour. L'île des Pins ce sera pour une autre fois.
La récolte des bivalves dans le sable blanc bat son plein. Ils finiront à la poêle avec un soupçon d'ail et accompagnés d'un petit blanc de France, cordon ombilical oblige.
La version calédonienne de l'armée n'a pas l'air désagréable: les bidasses viennent se bronzer en famille sur l'îlot à bord d'une péniche de débarquement et c'est surement plus agréable qu'une "perm" à Longwy...

Mouillage à l'îlot Signal. Un filao salue Filao







Naia

Une marina creusée, aménagée, équipée de pontons privés.
De la terrasse de sa maison on rêve en charentaises aux prochaines traversées océaniques à bord du fier vaisseau qui oscille au ponton.

DOWN UNDER - NOUVELLE ZELANDE - L’ÎLE NORD




Auckland

Samedi 17 janvier - Adieu Nouméa, Bonjour Auckland. A l’aéroport un panneau « Catherine et Gérard » s’agite ; notre taxi est là envoyé comme prévu par notre B&B le « Great Ponsonby Arthotel », une charmante maison victorienne au beau milieu du quartier branché de Ponsonby.

Le quartier Ponsonby

Downtown, où sommes nous ? A San Francisco, à Seattle? Non, l’anglais n’est pas de l’américain c’est un anglais rapide, bouffé : tendre l’oreille et se concentrer.
Balade dans les marinas, le musée de la marine, la Sky Tower, haute de 240 m, d’où se jettent des ados en mal d’émotion au bout d’un élastique. Rassurez vous, l’élastique est tenu par un autre élastique, lui-même tenu par un cable et ça a l’air solide. La chute est rapide, très rapide, mais la publicité dit « sans danger ». De là haut, tout là haut vue sur Auckland et ses eaux lumineuses à travers des vitres à pente négative. Gérard devient gris. Il ne supporte plus du tout le vide ce qui nous a épargné les 200$ du saut à l’élastique.

Auckland vu de Waitemata harbour

La "sky tower"

Catherine n'a pas voulu sauter

Dîner au Belgium Cafe : au programme, on s’en serait douté, des maxi-moules avec, of course, des frites et de la Stella Artois!
Fièrement campé au pied de Queenstreet, le Ferry Building construit en brique rouge en 1912, abritait autrefois l'autorité portuaire et aujourd'hui des restaurants chicos. Le Civic Theater: un des plus beaux cinémas du monde. Le luxe des décors est le fruit du travail de dizaines d'artisans lors de la grande dépression de 1929. Des centaines d'éléphants en plâtre surveillent ses escaliers labyrinthiques. On se demande ce qu'ils vont imaginer pour la grande dépression de 2009...
Mais Auckland c'est aussi le fief de la voile, la ville de la mer.
La Coupe America et la victoire des Néo-Z contre les Américains l'a rappelé au monde entier en 1995. Aujourd'hui, quelques participants sont déjà présents, à l'eau ou sur les quais du "America's cup village" car les éliminatoires pour la prochaine coupe débutent dans 2 semaines.
A deux pas de là, "Endeavour" un vétéran de la Coupe, construit en 1934 par les chantiers Camper & Nicholsons sur un plan de Charles Nicholson pour Thomas Sopwith pour être un challenger de la Coupe de l'America. Ce voilier exceptionnel des années 1930, qui appartenait au Royal Yacht Squadron du Royaume-Uni, ne put battre ni le Rainbow en 1934, ni le Ranger en 1937, malgré un potentiel exceptionnel. Il est toujours considéré comme le plus beau Classe J jamais construit. Et c'est un privilège de pouvoir l'admirer remis à neuf.

Endeavour

Au musée maritime on admire les bateaux légers à balanciers avec lesquels et les Maoris n'ont pas hésité à traverser le Pacifique pour atteindre Aotearoa.
Cinq siècles plus tard les immigrants, pour la plupart Anglais et Ecossais, s'empilaient pour des mois dans des cabines surpeuplées...
On ne peut que rester admiratif devant le courage de Colin Quincey qui en 1977 traversa les 2200 km de la mer de Tasmanie à la rame, à bord d'un dory du Yorkshire en 63 jours et 7 heures. Jamais personne n'a renouvelé l'exploit dans ce sens depuis. Devant la petitesse du dory et la vétusté du matériel, on reste sans voix.
Il y a quelques jours son fils Shaun, 24 ans, vient d'annoncer qu'il repartirait sur les traces de son père dans le sens Australie Nouvelle zélande...
Il ne faut jamais oublier que ce sont les Néo-Zélandais qui ont inventé le saut à l'élastique.

Le nord de l’île nord

C'est le début de notre balade vers le nord et on roule à gauche alors, attention !
A Whangarei, nous retrouvons, Oh surprise, Carolyn et Stephan à bord de « Fruity fruits » leur magnifique plan Clark, un superbe ketch vieux de 30 ans. Café, bavardage...
Puis, direction Paihia sur la « Bay of Islands », point d’arrivage de James Cook lors de son premier voyage, une immense baie constituée d’une dizaine d’autres baies et parsemée d’îlots. L’eau y est calme et cristalline. Des trawlers sont à l’ancre, des voiliers, toutes voiles dehors glissent lentement sur ce sol bleu argenté. Un mélange de Maine, et de Norvège à moins que ce ne soit tout simplement la Nouvelle-Zélande, trois cousins en tout cas. Nous dormons dans un appartement dominant la baie, appart digne de figurer dans un journal d’architecture. Nous marchons sur la pointe des pieds dans la demeure de Heinz, un Bernois immigré, pas près de retourner pêcher dans la Sarine.

Bay of islands

C'est incroyable ce que le gouvernement NZ peut faire pour promouvoir et mettre en valeur la culture maori. C'est à se demander si les British d'origine, les Pakehas, n'ont pas un petit peu mauvaise conscience.
La visite du site historique de Waitangi où fut signé le traité du même nom en est un bel exemple. Une sorte de reconnaissance mutuelle des Maoris et des Anglais appelés à se partager le même sol.
En réalité la notion de biens fonciers n’ayant aucun sens chez les Maoris communautaires, le traité fut bien vite détourné de ses objectifs au profit des colons Anglais.

Treaty house

Pelouse anglaise venant mourir dans la mer

Cette pirogue de guerre de 35 m, un Waka,fut construite en 1940 pour commémorer le centenaire du traité. Il fallut des mois pour réussir à synchroniser les 76 rameurs

Un tribunal, le Tribunal de Waitangi fut établi par agrément royal du 10 octobre 1975. Le Treaty of Waitangi Act qui lui donnait naissance avait pour but de réaffirmer les principes énoncés dans le Traité et de créer une juridiction capable de juger des violations avérées de celui-ci. Le mandat du Tribunal, limité à l'origine aux conflits récents, fut à partir de 1985 étendu pour couvrir tous les conflits fonciers depuis 1840, y compris durant les guerres māori.
On apprend un peu plus chaque jour sur les tribus Maori : leur origine, leurs coutumes, leurs légendes, leur situation actuelle. Après la visite du site et du musée, spectacle Maori avec danse, chants et jeux.
Le site est superbe : pelouses anglaises venant mourir au bord de la baie des îles.
Russel, premier village implanté par les British dans ce pays, de l’autre côté de la baie est atteint au moyen d’un petit ferry qui évite 20km du tarabiscotage côtier. Village considéré au début du 19ème siècle comme une ville de débauche, une ville de péché: 30 tripots entouraient le petit port! L'église anglicane réagit en créant Christchurch; puis, l’évêque Pompallier essaya d’expliquer aux habitants les bienfaits de l’église catholique par rapport à l’anglicane. Sa maison est aujourd'hui restaurée. Plus loin le plus vieux pub de Nouvelle-Zélande (peut-être un des 30?) rappelle que Russel est le premier village implanté par les British dans ce pays.
En route pour la plus longue plage de NZ et peut-être du monde.
La première pensée est pour Papou et ses 99 années bien remplies : bon anniversaire ! On va fêter ça en roulant sur une plage de 99 milles : un mille par année. Une plage de sable blanc le long de la mer de Tasmanie dont les rouleaux éclatent en passant du bleu indigo au bleu pastel puis au rose dans un fracas qui laisse indifférents les huitriers-pies, les cormorans à plastron blanc, les mouettes aux pattes et bec rouge vif et même un petit manchot bleu tout esseulé. Un gros amas de rochers noirs basaltiques cherche à contenir la mer qui vient s’y écraser. Des pêcheurs au lancer n’en finissent pas de remonter des groupers, nombreux dans cette eau oxygénée.

En route! Plus que 99 milles

La sortie? C'est juste à droite!

La mer de Tasmanie se fâche



Quelques cadavres rouillés de voitures émergent du sable rappelant que la plage n’est praticable qu’à marée basse et que quelques imprudents avaient oublié de lire l’almanach avant de partir et n'ont pas trouvé la sortie. Il n'est pas étonnant que cette plage soit interdite aux voitures de location. Accès en 4x4 avec guide uniquement!

Je ne suis pas sûr de pouvoir la revendre d'occase...

Au delà de ce spectacle, des dunes hérissées de tussoks et, dans le lointain le phare de Reinga, extrémité nord de l’île nord, lieu de départ des âmes maoris, sorties de leur enveloppe terrestre et qui s’en retournent au pays des ancêtres, Hawaiki.

Ne voyez vous pas les âmes maoris qui s'envolent vers Hawaiki?



Pic-nic digne du « Déjeuner sur l’herbe » organisé par notre guide-Renoir sur fond de plage et de pinède : du panier d’osier à rabats sortent des merveilles, salade de fruits de mer, poulet rôt i de sa ferme, fraises, le tout arrosé d’un petit blanc de Karikari de derrière les fagots.
Sommeil le long de la plage, face à la mer qui gronde.
Dès qu'il est question d'inventer un nouveau sport, dangereux de préférence, sinon au moins original, il y a toujours un Néo-Z dans le coin qui crie "Présent!".
Ici, il n'y a pas de neige mais des dunes. Pas de problème! Vive le surf sur sable!
Petit déjeuner-bavardage avec nos logeurs, américains et anciens navigateurs, arrivés en NZ après une traversée du Pacifique. Enthousiasmés par le pays, ils ne sont jamais repartis.
La route a remis le cap au sud. Collines et montagnes basses, conduisent vers l’immense port naturel de Hokianga. Vers l’an 900 le mythique et incontournable Kupe, le grand voyageur polynésien, en serait reparti vers Hawaiki après son exploration de l’île. Les Maoris baptisèrent cette embouchure : Hokianga nui a Kupe, le grand retour de Kupe.

Voilà du typique NZ: des pâturages jusqu'à la mer, des milliers de moutons. En tendant l'oreille vous entendrez même le vent.

Attention! Hauts fonds!

L'embouchure sableuse est paraît-il jonchée d’épaves. Il est fortement recommandé de rentrer à marie haute.
Et c’est la découverte des Kauris, ces arbres géants qui recouvraient autrefois l’île nord de la Nouvelle- Zélande. Il en reste quelques uns dont un ancêtre de 2000 ans, le Te Matua Ngahere, le père de la forêt ! Un autre, le Tane Mahuta ou seigneur de la forêt, un jeunot de 1200 ans n'en est pas moins impressionnant. Tronc haut, large, se desquamant, gris satiné. Pas de branches sur le tronc, perdues pendant la lente croissance, sinon une tête feuillue.

Forêt primaire

Tanemahuta: le seigneur de la forêt

Qui disait que les fougères arborescentes n'étaient pas si grande que ça?



Certains kauris ont été conservés dans la tourbe et ont 45000 ans ! Leur état de conservation est tel que des sculpteurs-ébénistes se régalent en confectionnant des tables, des chaises ou tout simplement des bols. Gérard hésite entre une table et ses 12 chaises et un escalier taillé à même un tronc. Devant la mine maussade de Catherine il renonce et achète deux dessous de bouteilles.

Ces Kauris des anciennes forêts de l’île nord sont ainsi restés enfouis dans la tourbe pendant toute la période glaciaire. Depuis la fonte des glaces, il y a environ 12’000 ans, le bois resta préservé par cette tourbe sans se pétrifier. On les date entre 30 et 50'000 ans au carbone 14 (limite supérieure de cette technique). Leur âge est de 1200 à 2000 ans, leur circonférence est d’environ 12 m et leur hauteur approximativement de 60 m! Bien que cet arbre pousse également en Australie, aux îles Fidji, en Malaisie et à Borneo ce phénomène de conservation est unique à la Nouvelle-Zélande.
Voila une semaine que la Nouvelle Zélande nous séduit. On s’y sent bien : la température est douce, la même que chez nous au printemps avancé, la lumière est celle des pays méditerranéens, le relief aimable, celui de l’Angleterre ou du Jura. Les côtes rappellent celles de la Norvège sud mais avec des couleurs tropicales. Les plages sont nombreuses, immenses, blanches bordées de bleu pastel ou turquoise. La végétation est dense, touffue où prédominent les fougères arborescentes. La population est complètement disséminée, des petites fermes ça et là qui respirent la propreté, le labeur et le respect de la nature. Bref, on s’y sent bien, très bien et les Neo-Z sont très « friendly ».

La péninsule de Coromandel

En 1961, un ingénieur-écologiste-potier - rien que ça - acquiert 22 hectares de collines argileuses au nord de Coromandel Town. Pour aller chercher l’argile de ses poteries et le bois pour alimenter ses fours il se met à concevoir et à construire un petit train, fait de pièces de récupération d’installations minières, qui aujourdhui serpente au milieu d’une forêt tropicale. Tout au long de son circuit de 3 km, sur 2 spirales, 5 voies de dégagement et 5 viaducs la petite locomotive halète en tractant ses 3 wagons bondés. « Anybody from Auckland ? » « Yeah, here ! » « Then wellcome to New Zealand » La blague habituelle de la campagne à l’égard de la grande ville. Au sommet se découvre le magnifique golfe de Hauraki.

En route pour une aventure ferroviaire tropicale

Le golfe de Hauraki

Arrivée dans notre gite B&B, la « Church accomodation » à Hahei sur la côte pacifique de la presqu’île de Coromandel. On y dort dans une petite case entourée de végétation tropicale. Le bâtiment principal, un excellent restaurant de poissons et fruits de mer, n’est autre qu’une ancienne église anglicane, vendue, faute de paroissien, démontée, puis remontée à Hahei. Aujourd’hui les « paroissiens » sont nombreux et se régalent de Mahi-Mahi bien frais.

Notre home pour deux nuits

La péninsule de Coromandel aligne une succession de magnifiques baies et de plages blanches de rêve alors que dans l’arrière pays alternent forêts denses et alpages à vaches.





Mais ces célèbres plages du Coromandel sont bien protégées par l’effort physique. Pour mériter celle, superbe, de Cathedral Cove, aux majestueuses formations rocheuses, ce sera ¾ h de transpiration sur un sentier en montagnes russes assorti d'une série d’escaliers.

Cathedral Cove


Sur une autre plage, la Hot water Beach, un spa naturel où les émanations thermales font fumer le sable. Chacun, pelle à la main, se creuse une baignoire, construit des petites digues pour éviter que la mer ne l’envahisse. Puis on se trempe les fesses dans l’eau chaude après s’être brûlé les pieds… Des familles entières barbotent en cercle. L’atmosphère est laborieuse et rigolarde.

Hot water beach

La porte d’entrée sud du Coromandel c’est Katikati. Un jour la municipalité décida de réagir devant ce flot de touristes qui passait, sans un regard, à travers son petit bourg endormi, si pressés d’atteindre le sable fin. Les murs des maisons de la rue principale furent confiés à des artistes locaux qui transformèrent le bourg en une gigantesque fresque à ciel ouvert relatant l’histoire de la ville et de ses habitants. Une représentation très "Travail, famille, patrie", rien à voir avec les peintures révolutionnaires du village Sarde de Orgosolo ni avec celles, surréalistes d'Ustica. Aujourd’hui, le touriste s’attarde et regarde.

Fresque murale à Katikati

Alternance de paysages : forêts tropicales avec les inévitables fougères arborescentes, vallons et collines à vaches, alternant avec des forêts de conifères, des prés verts et des bords de mer longés de sable.
Tout à coup surgissent des cultures bizarres. Des vignes ? Non c’est un petit peu trop grand et les feuilles sont différentes. Alors ? Nous venons d’arriver à Te Puke la capitale mondiale du Kiwi. Pas les volatiles, pas les Néo-Z mais les fruits originaires de Chine. Exportés dans le monde entier à partir de 1950 ce fruit est maintenant cultivé un petit peu partout et les Néo-Z se mordent les doigts de ne pas avoir breveté le nom « kiwi ».
Quant au jus de kiwi : c'est un délice !


Pas de la vigne! Des Kiwis!

Mais dans la région, pour faire fortune on peu aussi exploiter des mines d’or.
A Waihi une immense mine d’or à ciel ouvert, un énorme trou de 250m de profondeur, aux escarpements ocre, équipée de bulldozers et de tracks pour ramasser le quartz aurifère. Tout commenca en 1878 où 2 compères prospecteurs découvrirent un filon. Ils prirent une concession pour cette mine qu’ils nommèrent Martha’s mine du nom d’une copine (quand on voit la photo de la fille on imagine qu’ils devaient être drôlement bourrés…). Et Martha’s mine devint une des plus importantes mines du monde. Pendant 70 ans la mine fut souterraine et 600 personnes s’activaient dans 178 km de galeries sur 15 étages. La montée du cours de l’or a relancé l’exploitation, en surface cette fois, en 1988. La richesse d’antan n’est plus qu’un souvenir et les visites guidées rapportent probablement plus au petit bourg. La transformation en parc d'attraction est même envisagée.

Rotorua et le plateau volcanique

Et voici Rotorua, la fumante, la bouillonnante. En attendant de rencontrer Hadès, prenons du repos au bord du Styx, au bord du lac à La Koura lodge, superbe, les pieds dans l’eau.

Apéro sur la berge...

Rotorua chevauche une faille volcanique qui s’étire sur 200km. Il en résulte une grosse activité géothermique dans toute la région et une persistante odeur de soufre dans la ville à laquelle on s’habitue au bout de quelques minutes.
Partons en exploration pour de longues marches au pays de l’eau sacrée, le Wai-O-Tapu.
Comme Pascal a aujourd’hui 43 ans et que ça ne rajeunit pas, une journée sportive de remise en forme s’impose.
Le « pays des merveilles », Wai-To-Pu enchaine lacs, cavités, bains bouillonnants, terrasse siliceuse aux couleurs de l’arc en ciel. La « champagne pool » au pourtour orange et aux eaux fumeuses d’un b leu-vert profond.
Endroit magique où quelquefois l’ombre bienfaisante des fougères arborescentes réconforte le marcheur.



Et pourquoi cette frénésie de couleurs, d’éructions et de fumées ?
Parce que, lorsque il y a des millions d’années le continent originel de Godwana se disloqua et que la Nouvelle Zélande émergea de la mer, elle eut l’idée, pour que la vie soit plus excitante (encore une fois ce sont les Néo-Z qui ont inventé le saut à l’élastique) de se placer en plein sur une faille entre deux plaques tectoniques. Comme ça, ça remue, ça pète de temps en temps, ça chauffe et ça fume…







Rotorua, c’est aussi le haut lieu de la culture Maori et la ville compte la plus forte proportion de Maoris de tout le pays. Leur installation remonte à 1350 et aujourd’hui ils sont fiers de montrer leurs traditions au public.
Et ce fut la soirée Maori : des guerriers qui arrivent en pirogue en poussant leurs cris belliqueux, la danse rituelle, le Haka de notoriété planétaire grâce aux All Blacks qui terrorisent leur adversaire avant chaque match, d’autres danses plus tendres, plus féminines accompagnées de chants sans oublier un Hangi (« four creusé dans la terre » ) un dîner où toutes les viandes cuisent au fond d’un trou entourées de pierres chauffées à blanc.

Les guerriers de la tribu Mitai



A côté de celui des All Blacks, ce Haka parait un petit peu efféminé



Bien repus, à la fin du hangi, nous emboitons le pas d’un guide qui nous conduit de nuit à travers un zoo pour voir ces fugitifs kiwis nocturnes.
En rien lassés par les découvertes géothermiques de la veille, nos pas nous conduisent pour une longue promenade le long de la vallée volcanique de Waimangu et son impressionnant lac de cratère, le cratère inferno, joyau fumant de couleur bleu pale. Des fumerolles parsèment les coteaux environnants. Le sentier, au bout de 2 heures, vient buter sur le lac Rotomahana, lieu des célèbres terrasses rose pale, sorte de Pammukale néo-zélandais qui furent englouties lors de la violente éruption du mont Arawera en 1886. Il est pourtant bien tranquille ce volcan là juste de l’autre côté du lac que parcourt un paisible petit steamer.







Les rotules, les chevilles et les hanches crient « pouce ! ». Leur complainte est entendue et de retour à Rotorua c’est l’immersion dans les bassins du Polynésian Spa dont les piscines brûlantes aux odeurs soufrées apportent leurs bienfaits…

Mordor

Aujourd’hui, nous quittons la ville des bains et le pays de la géothermie pour le pays des volcans, pour Taupo, Whakapapa et Ohakune .
C’est le pays de Mordor, et comme nous le raconte Tolkien, mille ans après le début du Second Âge, Sauron établit son royaume au Mordor, le "Pays Noir", une terre aride et volcanique située à l'est de l'Anduin et ceinte à l'ouest et au sud par deux puissantes chaînes de montagnes. Au coeur de ce territoire s'élevait l'Orodruin, montagne solitaire sur le plateau de Gorgoroth où elle faisait face à Barad-dûr, la terrible forteresse de Sauron. Au Mordor vivaient des orques, des trolls et des esclaves humains qui une fois libérés et victorieux renommèrent la contrée "parc national de Tongariro".

Au delà du lac Taupo, se profile Mordor, l'empire de Sauron et nous frissonons déjà d'épouvante

L'empire est là, devant nous!

Pour protéger l'Empire, les orques ont détruit la route. Nous continuons à pied au milieu des pierres basaltiques encore fumantes de l'enfer...

Ici, même une simple station de ski est sinistre : un amoncellement de roches basaltiques noirâtres. Montée en télésiège pour le coup d’œil sur les volcans. Aucune lueur ne sort des entrailles de la terre : Sauron doit être absent. L’un d’eux est encore enneigé en cette fin de juillet, pardon, janvier… la vue est belle sur les montagnes où alternent le noir minéral et le blanc neigeux. Au loin une plaine vert clair parfait l’horizon. Délaissant le télésiège aux touristes du troisième âge (…) nous nous élançons toutes rotules grinçantes sur les pierriers d’un magma figé depuis des lustres. Fourbus, sains et saufs et heureux nous regagnons le « camp de base ».
Repos au Powderhorn hotel, réplique d’un hôtel de Zermatt avec piscine d’eau chaude afin que les rotules nous pardonnent. Un petit peu snobs, nous préférons l’authentique Zermaterhoff au pied du Cervin. En réalité, Ruapehu est le plus important domaine skiable de l'île nord. Les deux zones Whakapapa et Turoa couvrent 1800 hectares de pistes. Et les Néo-Z ont l'air d'adorer.
Tournant le dos à Mordor dont on aperçoit au loin les cîmes neigeuses, rejoignons l'Ithilien, jadis le territoire d'Isildur, à l'est de l'Anduin et l'une des deux principales provinces du Gondor. Un très beau pays de collines et de forêts: le "Jardin de Gondor".

L'Ithilien: le jardin de Gondor

Adieu les pays tropicaux-alpestres, bonjour les vallons très british. Le paysage change, le ciel aussi. Il devient gris. Le vent souffle. Les fourrures polaires réapparaissent. Bien que moins riants, les espaces sont toujours aussi grandioses, parsemés de petites fermes entourées de troupeaux de bovins et d’ovins très denses.

Wellington

Quelle est la capitale de la Nouvelle -Zélande ? Auckland ! Et bien non c’est Wellington ! Une ville blottie tout au sud de l‘île nord, au centre géographique du pays.
Le british William Wakefield acheta aux Maoris le site de la future ville - 18000 hectares - pour 60 bonnets de nuits rouge, 100 mousquets, cent couvertures, une douzaine de parapluies, des clous et des haches.
Allons voir si c'était une bonne affaire.
A Wellington, ça souffle dans le détroit de Cook.
Etroites et balayées par le vent, les rues ménagent peu d'abris. Tôt où tard on se retrouve sur les quais et peu de quai au monde sont ainsi ouverts à tous. C'est l'heure du déjeuner et la fraicheur n'empêche pas le monde du business de s'adonner à son sport favori: vélo, jogging, patin à roulettes - il y en a pour tous les goûts.
La mer du port est hérissée d’embruns mais ça n’empêche pas quelques ados de sauter et de plonger dans l’eau froide. Lèvres violettes, ils sautent et ressautent encore.
Au bout du quai trône le Tapapa, le plus beau musée de Nouvelle-Zélande. Une petite guide, bénévole-3ème âge, institutrice à la retraite, nous entraine à travers les salles emportée par son dynamisme communicatif, jonglant avec géologie, histoire et nature.
Balade le soir dans un Wellington assoupi. Moules-frites, harengs et Leff à la brasserie belge wellingtonienne. Comme à Auckland, c’est plein. Les moules frites et la Stella c’est très branché en NZ.
C'est le 30 janvier, la fin de l’île nord : 2240 km au compteur.
Au programme, la traversée du détroit de Cook « Cook Straight » pour rejoindre l’île sud. Nous profitons des dernières heures à Wellington pour monter sur les hauts de la ville en empruntant l’historique cable car.

Cable car à Wellington: c'est presque San Francisco

Descente vers la ville à pied à travers un très beau jardin botanique tropicalo-floral le long des coteaux où s'alignent, comme à San Francisco, les "painted Ladies",ces vieilles demeures victoriennes en bois multicolores.
La traversée s’effectue par un petit vent de force 4-5. Le ferry glisse sur une mer bleue scintillante. L’île du sud et ses montagnes ocre s’approchent rapidement. Le Ferry embouque un fjord au fond duquel se niche Picton.

Au revoir l'île nord, à nous l'île sud!